Patrick Gilles, décorateur et scénographe

Patrick Gilles est indissociable de Dorothée Boissier avec qui il a créé l’agence Gilles & Boissier. Ils se sont connus à leur début chez le décorateur Christian Liaigre.

Il y travaille quelques années tandis qu’elle quitte rapidement ce premier point d’ancrage pour rejoindre l’équipe de Philippe Starck où elle restera 9 ans. Sortis tous deux de formation phares, lui Camondo et elle Penninghen, ils décident de s’associer en 2004.

A l’exposition AD Intérieurs 2013, l’agence Gilles & Boissier présente une chambre aux paravents dit la chambre d’Alice.

Est-ce que le thème imposé Métamorphose était un thème inspirant et pourquoi?

Ce thème nous a parlé immédiatement. Il nous a paru judicieux de faire une chambre. Après, nous avons choisi la couleur. Nous voulions une couleur solaire. Nous avons travaillé avec un artiste avec qui nous avons l’habitude de travailler,  François Houtin.

La forêt est le thème de la fresque. Le clin d’œil à la forêt nous semblait important. L’architecture provient de la forêt, du boisé, de la cabane…C’est l’utopie du végétal et du bois. On recrée un cocoon.

Est-ce que le syndrome de la feuille blanche du décorateur existe?

Non. Nous travaillons ensemble avec Dorothée Boissier. Nous avons une équipe derrière. Plus nous travaillons ensemble et plus nous arrivons à rebondir. Cela crée une émotion. Nous sommes dans un domaine, la décoration qui est très cadré. C’est un hôtel particulier, une chambre, avec un thème. C’est comme une sorte d’entonnoir. Il s’agit d’un travail de décorateur, pas de plasticien. Ce n’est pas une installation.

Vous avez fait plusieurs croquis? Comment se passe ce processus de création?

Oui. Dans la première étape, nous étions dans l’abstraction totale, dans un pur délire sensoriel. Nous voulions des livres, écrire, des poèmes. Et finalement, en échangeant beaucoup avec Dorothée, on s’est trouvé hors sujet. Un ami plasticien à qui nous avons parlé du projet, nous l’a confirmé. Donc, nous sommes revenus à un espace classique, une chambre, un bureau. Nous souhaitions faire passer une émotion. La chambre peut parler à tout le monde. Les fonctions sont connues.

 

Pourquoi avez-vous choisi la chambre?

Nous souhaitions sortir de l’abstraction. Nous avons regardé l’espace comme on le ferait avec un cluedo. De part, le volume attribué (40m²), nous avons choisi la chambre. Cela doit être aussi que nous faisons beaucoup d’hôtels en ce moment. Nous souhaitions exprimer autre chose.

Quelles sont les contraintes quand on travaille dans un lieu qui a cette histoire avec de tels volumes?

Le thème proposé par AD ouvre largement le spectre. Nous aurions pu partir sur différents contes. Il y avait de nombreuses possibilités. L’espace est généreux pour une chambre. Il y a une belle hauteur sous plafond. Nous avons souhaité garder la structure du bâtiment visible. Pour délimiter notre espace, nous avons utilisé des paravents. Le sol cadre également l’espace. C’est un volume à l’intérieur de l’espace qui permet une mise en tension. Nous avons voulu garder la pièce telle quel avec ses accidents. Il n’a pas une géométrie parfaite. Notre volume lui est droit. Cela crée le contraste. Le paravent s’arrête à une hauteur précise. Nous avons choisi un jaune ancien dans l’esprit 18^ème siècle, date de construction de l’enclos des Bernardins. C’est un clin d’œil aux couleurs utilisées à cette époque dans la décoration. C’était le blanc de l’époque. Ce jaune date du 18^ème siècle.

Un conseil à nos lecteurs pour l’aménagement d’une chambre?

Se faire confiance. Ne pas se mettre de limite. Il n’y a pas de mauvais goût. Il faut partir du lit, de la façon dont vous voulez dormir. La qualité du matelas est importante.  Après, il faut travailler sur l’ambiance que vous voulez avoir en terme de couleurs. Un bon éclairage est également important.

Vos projets?

Les projets sont nombreux. Dans l’hôtellerie, avec la création d’un hôtel à Marrakech, le Mandarin Oriental sur 22 hectares. C’est 57 villas, 9 suites, un spa, des restaurants…. Il y a aussi l’hôtel Baccarat, à New York en face du Moma sera le premier hôtel de la marque sur le continent américain avec 115 chambres. Six Senses   nous a confié la décoration d’ hôtel Igloo à Megève – premier établissement en Europe du groupe. Nous travaillons sur un hôtel à Paris, l’hôtel Helder quartier Opéra (60 chambres). Nous nous occupons de plusieurs maisons à St Tropez, à Bâle. Il y a aussi la décoration d’un magnifique bateau de 55m en construction et un restaurant sur la plage à Saint-Tropez (Pampelonne).  Nous avons également en charge la décoration de boutiques : le flagship Moncler Paris rue du Faubourg Saint-Honoré (600 m²) et flagship Milan (300 m²). Il y aura l’ouverture d’autres boutiques courant 2014.

Vos envies?

Un petit hôtel au bord de la mer avec une fabrication artisanale. Six Senses  a une approche qui correspond beaucoup à la façon dont on aime voyage. Un service impeccable avec un appel à l’artisanat local. Nous voudrions prendre notre temps et apprendre à travailler avec des artisans locaux.

DKOmedia* publie un livre blanc sur l’utilisation des réseaux sociaux dans les métiers de la décoration, est-ce que vous utilisez les médias sociaux dans votre métier ?

Je suis en retard là-dessus. Autant à l’agence, tout le monde travaille sur ces médias, autant, je n’ai pas d’ordinateur. Dorothée les utilise. Je n’ai plus d’email. Je dessine à la main. Cela me permet aussi de rester concentré sur mon travail.

Toutes les informations sur l’agence Gilles & Boissier.

*DKOmedia est l’agence de marketing et de communication spécialisée dans les médias sociaux qui produit le magazine en ligne DKOmag.